La politique économique de Macron : Erreur d’analyse, erreur de timing

Fédération socialiste de Paris

Les chiffres de l’économie française du premier semestre 2018 sont décevants. La croissance du PIB en volume s’établit à +1,7% seulement sur un an et sur le dernier trimestre, le taux annuel n’est plus que de +0,6%, ces chiffres sont bien en dessous de la moyenne européenne, respectivement à +2,2% et +1,7% pour les deux indicateurs. En glissement annuel, à juin 2018, l’indice de la production industrielle est en hausse de +1,6% et les indicateurs synthétiques du climat des affaires accusent un net repli depuis la fin de l’année 2017. Ce contexte délicat est également contrarié par une très forte hausse des prix à la consommation depuis le début de l’année puisqu’en glissement annuel, l’indice augmente à fin juillet de +2,3%.

Ce ralentissement de la croissance en ce début d’année 2018 touche l’ensemble de la zone euro, en raison de facteurs extérieurs négatifs (effet change avec la progression de l’euro et hausse des matières premières et en particulier du pétrole qui rognent le pouvoir d’achat des ménages). En France, les mesures fiscales prises (hausse de la CSG pas encore compensée entièrement par la baisse des charges) ont pesé sur la consommation des ménages. Au 2e trimestre, les grèves dans les transports ont constitué un frein supplémentaire à la croissance. L’emploi salarié dans le secteur marchand connait aussi une inflexion au deuxième trimestre, la variation sur un an n’étant plus que de +1,7% et la consommation des ménages progresse de seulement +0,8%, les nouveaux crédits aux ménages baissant drastiquement de 34,7% toujours en glissement annuel. 

Cette situation économique plus délicate complexifie l’équation budgétaire pour 2019 et oblige le gouvernement à opérer de nombreux arbitrages pour diminuer des déficits qui pourraient d’ailleurs ne plus respecter les accords européens.

En mai 2017 pourtant, Macron a bénéficié des effets de la reprise de la politique menée par Hollande avec une croissance revenue autour des 2,5/3%, similaire à la moyenne européenne. Cela a alors permis au chômage de décroître.

Les premières mesures économiques du gouvernement Macron entraînent un décrochage de l’économie française par rapport à ses principaux partenaires, l’amenant d’ailleurs à abaisser ses prévisions de croissance sur 2018 et 2019 à +1,7% vs +2% précédemment.

La baisse de la croissance attendue va se traduire par une diminution des rentrées fiscales, donc des recettes publiques, ce qui contraint le gouvernement à diminuer les dépenses publiques. Le gouvernement Macron s’attendait à ramener le déficit public à 2,3% du PIB fin 2018 vs 2,6% en 2017 contre une moyenne européenne à 0,9%, une fois pris en compte la modification du CICE en baisse de charges pour les entreprises. Mais avec une reprise moins forte, le déficit risque au mieux de se stabiliser à 2,6% et 2019 pourrait même sortir du cadre autorisé par Bruxelles, c’est-à-dire dépasser les 3% puisqu’en 2019 l’impact financier de l’arrêt du CICE sera de 25 Md€ à financer, soit plus d’un point de PIB. De nouveaux financements doivent donc être trouvés ou alors il faut recourir à des baisses de charges, mais la conjoncture ne peut plus venir à la rescousse.

Une autre erreur manifeste se profile, l’attaque du pouvoir d’achat sur un certain nombre de catégories (retraités -hausse de la CSG et moindre revalorisation des pensions-, famille par la baisse des allocations familiales et des APL, probable diminution à venir des allocations chômage). Cette stratégie aura un impact négatif sur la confiance des ménages, sans compter l’effet psychologique négatif en début d’année 2019 du début du prélèvement à la source des impôts. La baisse des cotisations sur les heures supplémentaires aura aussi un effet négatif sur les recettes.

Dans la plupart des mesures économiques engagées, on entrevoit donc une doctrine visant à privilégier les hauts revenus, stratégie du ruissellement qui n’a jamais été démontrée, (plafond de l’impôt sur le patrimoine à 30%, réduction de l’assiette de l’ISF) et les actifs au détriment des inactifs et en particulier des retraités (qui forment pourtant un électorat sensible). Ce pari est très risqué car les entreprises, sauf dans certains secteurs particuliers ne sont pas contraintes par des difficultés de recrutement, mais demandent plutôt des mesures destinées à relancer l’activité et la demande. Les attaques sur le pouvoir d’achat des bas et moyens revenus et l’arrêt des emplois aidés produisent l’effet inverse et ont stoppé la dynamique favorable de la consommation. 

Difficile d’imaginer une inversion de tendance sur ce deuxième semestre. Le ralentissement de la croissance risque d’anéantir les éventuels effets bénéfiques de la baisse des cotisations sociales dès octobre et de la première tranche de la taxe d’habitation. Sur le plan international, de nombreux écueils pointent sur la croissance : la situation politique en Italie, le ralentissement de l’économie turque (la France est relativement exposée via le système bancaire), les tensions commerciales et les risques de ralentissement économique dans les émergents, au premier rang desquels la Chine. Ces facteurs risquent de peser sur la croissance mondiale en 2019.

Rappelons que le potentiel de croissance de l’économie française reste limité à environ 1,3% et ceci en dehors des effets éventuels négatifs décrits ci-dessus. Les mesures du gouvernement, orientées vers l’investissement des entreprises et non vers le pouvoir d’achat des ménages (dont les effets ne pourront se faire sentir qu’à moyen terme) vont donc à court terme pénaliser la consommation.

En conséquence, le parti socialiste condamne cette politique de classe, qui ne fera qu’accentuer les inégalités. La nécessaire réorientation de la politique économique doit redonner du pouvoir d’achat aux ménages en concentrant les aides aux faibles et moyens revenus. Augmenter le Smic, remettre en place les emplois aidés, favoriser les investissements permettant d’accélérer la transition énergétique sont des décisions qui doivent être prises rapidement.

Les bases de cette nouvelle politique économique doivent reposer sur des problématiques élargies dont les axes seront :

  • 1/ Réaffirmer le rôle de l’Etat stratège qui impulse l’ensemble des acteurs économiques
  • 2/ Reprise des investissements de productivité et de capacité sur le territoire national pour restaurer la compétitivité de l’offre industrielle (formation et recherche pour inverser la désindustrialisation).
  • 3/ Améliorer le financement des entreprises par des mesures d’incitations fiscales ciblées, faire revenir l’épargne des ménages vers l’investissement productif.
  • 4/ Lancement d’un fonds d’investissement souverain, élargissement du rôle de la BPI.

Sur ces bases, nous pourrons développer avec les territoires à la fois une amélioration de l’offre et une relance de la demande en couvrant l’ensemble de la chaine de valeur (formation en amont, innovation, création et protection des brevets, financement public/privé, réindustrialisation).

J-N

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